La fraude est ici appréhendée dans toutes ses dimensions, spatiales, temporelles, politiques, économiques, juridiques et sociales. Ce livre est le résultat d’un vaste programme de recherches internationales et entend surtout éclairer les relations entre fraudes et territoires. La porosité des frontières politiques ou « naturelles » – mais chaque frontière est artificielle – délimite avant tout une géographie des contournements. Placée dans une perspective de longue durée, car le phénomène de la fraude est ancestral, la fraude se sert des difficultés, voire de l’absence de volonté, des États à contrôler tous les flux ou plutôt les marges. La fraude est une activité économique, par définition mal connue, qui, dans certaines circonstances (guerre, occupation, pénurie...) prend une place prédominante dans la vie quotidienne des populations. Elle peut aussi devenir une question de survie. Les règles juridiques et légales, qu’elles soient douanières ou fiscales, induisent des comportements frauduleux qui proviennent parfois de traditions commerciales préexistantes aux normes étatiques. Enfin, la fraude, malgré ses dangers, fait vivre les fraudeurs et engendre des corps de contrôle. Du Tonkin à la Guadeloupe, en passant par l’Empire espagnol et le Benelux, de Marseille à Londres, en passant par Newport, Calais, Lille, Anvers, le Dauphiné ou encore l’Anjou, les textes de cet ouvrage pluridisciplinaire offrent un vaste panorama des modalités et des acteurs de la fraude. Ils soulignent à la fois les constantes et la diversité des trafics illicites (denrées alimentaires, armes, brevets, sel, monnaies...) dans le monde depuis le XIIIe siècle.