Le Séminaire interdisciplinaire d'études juridiques des Facultés universitaires Saint-Louis a suscité la collaboration de juristes et de spécialistes en sciences humaines afin d'éclaircir les rapports multiples entre les notions de droit et d'intérêt. Ce thème s'est révélé si fécond qu'il est apparu nécessaire de publier les résultats de ces travaux dans trois volumes distincts. Le présent volume a pour titre: Entre droit et non-droit l'intérêt. Il part de l'idée que I'intérêt a toujours été, dans la pensée juridique traditionnelle, ou disqualifié (ramené au fait, rejeté dans le non-droit), ou surqualifié (assimilé au droit subjectif et ainsi «normalisé»). Comme s’il était impossible de reconnaître des effets juridiques spécifiques à l'intérêt entre droit et non-droit. Comme s'il fallait nécessairement raisonner dans les termes d'une logique binaire. À l'encontre de celle-ci, l'auteur plaide pour la prise en compte d'une « échelle des intérêts » qui, des intérêts illicites aux intérêts consacrés sous forme de droits subjectifs, ménage la diversité de leurs formes et la variété de leurs fonctions dans l'ordre juridique. Fonction créatrice qui consiste à transformer certaines prétentions en droits subjectifs et certaines personnes ou certains groupes en acteurs juridiques. Fonction limitative qui, à l'inverse, conduit à contrôler l'exercice des droits subjectifs et la toute-puissance des volontés individuelles. Fonction de régulation globale enfin, qui contribue à la mise en place d'un nouveau mode de production du droit qui fonctionne à I'intérêt et à la norme et se superpose au module classique fonctionnant au droit subjectif et à la loi. Cette analyse de droit positif conduit à poser des questions de théorie générale du droit (droit dont les frontières sont relativisées et les sources diversifiées), de philosophie politique (sur les tensions internes au libéralisme) et d'éthique (sur les apories d'une légitimité purement solipsiste).