Création napoléonienne, le recteur d’académie occupe une place originale dans les institutions de la France depuis deux siècles. Fonctionnaire, représentant du ministère, le recteur est, à l’instar du préfet, d’abord perçu comme un agent du centralisme étatique ; particulièrement dans l’académie de Toulouse, la plus éloignée de Paris. Universitaire, le recteur n’est pourtant pas un haut fonctionnaire comme un autre. Son autorité, surtout dans une région qui compte une des plus anciennes universités d’Europe et la seconde population étudiante du pays, n’est pas simplement administrative, elle est aussi intellectuelle ; ce qui lui vaut le titre de « chancelier des universités ». Considéré comme un « pair » par ses collègues, il incarne la garantie des franchises universitaires, l’indépendance de la recherche et, à tous les niveaux du système éducatif, la liberté pédagogique des enseignants. Explorant deux siècles d’existence de l’institution rectorale et académique, les contributions réunies à l’issue du colloque « Les recteurs et le rectorat de l’académie de Toulouse ( 1808-2008) », illustrent la permanence de ces deux caractères de la fonction de recteur. Permanence... Mais aussi évolution, selon les différents régimes que la France a traversés depuis le Premier Empire, selon la personnalité des hommes (et de la seule femme) qui ont occupé le poste, selon la nature des problèmes à traiter et des défis à relever... Ce colloque pluridisciplinaire - qui réunit historiens, historiens du droit et sociologues, en confrontant le résultat de leurs recherches aux témoignages des sept derniers recteurs de l’académie de Toulouse - fait émerger une troisième particularité : son rôle de médiateur entre les intérêts locaux et les instances nationales. Chargé d’appliquer la politique du ministère « sur le terrain ». le recteur se trouve confronté aux attentes des populations, aux demandes des élus, aux inquiétudes des enseignants... Faire « remonter » à Paris ces aspirations est un de ses soucis constants, car il y va de la réussite de son action. Et cela de tous temps : au XIXe siècle, alors qu’il tente d’affirmer l’autorité encore fragile de la jeune institution ; sous la Troisième République, quand il installe l’école laïque dans les terres occitanes ; enfin, depuis la décentralisation des années 1980, qui en a fait un acteur majeur de l’aménagement du territoire de Midi-Pyrénées en matière de formation et de recherche.