Longtemps considéré comme un simple épigone de Chrétien de Troyes, Raoul de Houdenc est l’auteur d’une œuvre dense et variée, qui se décline en deux versants : romans arthuriens et récits allégoriques, tous écrits entre 1200 et 1235 environ. Les études ici réunies reviennent sur ce jugement et montrent que, bien qu’il ait écrit après le « maître champenois », Raoul a joui tout au long du Moyen Âge et jusqu’au xvie siècle d’une renommée qui n’avait rien à envier à Chrétien. Paradoxalement, son œuvre est à la fois drôle et désabusée. Drôle parce que Raoul maîtrise à la perfection l’art de la parodie burlesque, du contre-pied et de l’inattendu. Désabusée, car de son œuvre se dégage une nostalgie pour le temps passé et révolu de la courtoisie, définitivement supplantée par l’appât du gain et l’égoïsme de ses contemporains. De ce paradoxe naît une jouissive verve satirique, un plaisir de la fiction utile, qui apportent une compensation, ou du moins une consolation, en ces temps mauvais que faute de pouvoir contrer, on tient dans une distance joyeuse. Raoul propose ainsi des routes nouveles à la fiction qui, si elle doit beaucoup aux prédécesseurs de Raoul – à commencer par Chrétien –,se donne comme utile et plaisante, et rejette l’accusation de vanité dont, dès le tournant du xiiie siècle, fut accusé le roman. Les œuvres ici explorées sont Meraugis de Protlesguez, la Vengeance Raguidel, le Songe d’Enfer, le Roman des eles et le Dis Raoul Hosdaing.