« Il semble, au premier abord, qu’on ne saurait prendre un vif intérêt à l’histoire d’une jeune princesse morte à vingt-six ans, dont l’enfance s’est passée dans l’exil, et qui n’a paru qu’un instant à la cour de Louis XIV.
Mais il faut se rappeler que cette princesse est la fille de Charles Ier, et la sœur de Charles II ; qu’elle a été l’idole des plus belles années de la plus brillante cour du monde, que c’est par elle que fut conclue l’alliance entre Charles II et Louis XIV, et qu’enfin elle mourut empoisonnée dans tout l’éclat de sa beauté et de ses succès.
Son histoire, par Mme de La Fayette, renferme une vivante image des premières années du règne de Louis XIV ; il est piquant d’y retrouver, peints par la main d’une femme, et tels qu’ils étaient dans leur jeunesse, la plupart des personnages que le duc de Saint-Simon a connus et décrits trente ans plus tard.
Mme de La Fayette est elle-même un écrivain très-distingué, et si ce petit livre perdait son intérêt historique, il mériterait d’être conservé uniquement pour sa valeur littéraire. On y reconnaît partout l’auteur de Zaïde et de la Princesse de Clèvos, ces deux romans qu’on dédaigne de lire, et qui, pour la grâce et le sentiment, n’ont pas été surpassés.
Mme de La Fayette était de cette société de l’hôtel de Rambouillet, dont Molière a immortalisé le mauvais goût, mais où il se trouvait bien quelques esprits excellents à côté des Bélise et des Trissotin, puisque Mme de La Fayette s’y rencontrait avec Mme de Sévigné. Elle fut pendant vingt-cinq ans l’amie du duc de La Rochefoucauld, l’auteur des Maximes, et se jeta sur la fin dans la dévotion la plus austère, sous la direction du célèbre abbé Duguet, de Port-Royal. Elle mourut en 1693, âgée de soixante ans. »
Fruit d’une sélection réalisée au sein des fonds de la Bibliothèque nationale de France, Collection XIX a pour ambition de faire découvrir des textes classiques et moins classiques dans les meilleures éditions du XIXe siècle.