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grande couv
L'immoraliste
André Gide
Editeur: La Gibecière à Mots
2,49 €

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André Gide (1869-151)

"Sidi b. M. 30 juillet 189.

Oui, tu le pensais bien : Michel nous a parlé, mon cher frère. Le récit qu’il nous fit, le voici. Tu l’avais demandé ; je te l’avais promis ; mais à l’instant de l’envoyer, j’hésité encore, et plus je le relis et plus il me paraît affreux. Ah ! que vas-tu penser de notre ami ? D’ailleurs qu’en pensé-je moi-même ?... Le réprouverons-nous simplement, niant qu’on puisse tourner à bien des facultés qui se manifestent cruelles ? – Mais il en est plus d’un aujourd’hui, je le crains, qui oserait en ce récit se reconnaître. Saura-t-on inventer l’emploi de tant d’intelligence et de force – ou refuser à tout cela droit de cité ?

En quoi Michel peut-il servir l’état ? J’avoue que je l’ignore... Il lui faut une occupation. La haute position que t’ont value tes grands mérites, le pouvoir que tu tiens, permettront-ils de la trouver ? – Hâte-toi. Michel est dévoué : il l’est encore ; il ne le sera bientôt plus qu’à lui-même.

Je t’écris sous un azur parfait ; depuis le douze jours que Denis, Daniel et moi sommes ici, pas un nuage, pas une diminution de soleil. Michel dit que le ciel est pur depuis deux mois.

Je ne suis ni triste, ni gai ; l’air d’ici vous emplit d’une exaltation très vague et vous fait connaître un état qui paraît aussi loin de la gaîté que de la peine ; peut-être que c’est le bonheur.

Nous restons auprès de Michel ; nous ne voulons pas le quitter ; tu comprendras pourquoi si tu veux bien lire ces pages ; c’est donc ici, dans sa demeure, que nous attendons ta réponse ; ne tarde pas."

Michel a épousé Marceline, plus pour faire plaisir à son père que par amour. Lors du voyage de noces qui se veut aussi d'études, Michel tombe malade... Ce voyage va devenir une fuite pour lui... Mais à quoi veut-il échapper ?