Félix d’Hérelle (1873-1949), autodidacte génial, a découvert il y a cent ans (1917) des virus qui attaquent et tuent les bactéries. Il a appelé ces virus bactériophages et, avant la découverte des antibiotiques, il a eu immédiatement l’intuition que ces prédateurs/ dévoreurs de microbes pourraient permettre de traiter de nombreuses maladies bactériennes. Il a consacré sa vie à développer ce traitement (connu sous le nom de phagothérapie) et à le faire connaître dans le monde. Après avoir laissé la place à l’antibiothérapie pour traiter les maladies infectieuses, la phagothérapie, apparaît aujourd’hui comme une réponse à l’évolution inéluctable et préoccupante de la résistance des bactéries aux antibiotiques.
Outre l’utilisation médicale, cette découverte fondamentale a permis le développement de la biologie moléculaire qui connaît aujourd’hui un essor considérable dans de nombreux domaines de la recherche, tant fondamentaux qu’appliqués. Félix d’Hérelle a eu une large renommée avant la Deuxième Guerre mondiale et a été proposé dix années au Comité Nobel. Cependant, chercheur indépendant, il est mort pratiquement oublié en 1949. Aujourd’hui, il est méconnu du grand public comme du monde médical et scientifique. Son autobiographie, déposée à l’Institut Pasteur de Paris il y a quelques années par l’un de ses descendants, permet de réparer cette injustice. Elle a été produite lorsque l’auteur, de nationalité canadienne, réfugié à Vichy, était assigné à résidence pendant les années d’occupation.
Dans cet ouvrage, le docteur Alain DUBLANCHET, après avoir établi les véritables origines – françaises - de Félix d’Hérelle, a sélectionné les principales pages du manuscrit qui décrivent les emplois qu’il a occupés dans de nombreux pays (Canada, Guatemala, Mexique, France, Indochine, Pays-bas, Égypte, Indes, États-Unis d’Amérique, URSS). Au cours de ses pérégrinations, il a rencontré d’illustres contemporains dont il rapporte de savoureuses anecdotes. On apprend qu’en Amérique du Sud il a développé un moyen écologique pour détruire les invasions des sauterelles, véritable fléau agricole. C’est de retour en Europe, employé à l’Institut Pasteur de Paris, qu’il a isolé et étudié les premiers bactériophages, et a été à l’origine de la phagothérapie que l’on réhabilite aujourd’hui. Le centenaire de cette découverte fondamentale nous donne l’occasion de mieux connaître ce personnage flamboyant hors du commun.