La notion d’événement littéraire est née au dix-neuvième siècle, au moment où la littérature se constitue en objet historique, cependant que la médiatisation croissante du champ culturel entraîne des pratiques et des stratégies radicalement nouvelles. La conception événementielle de la littérature met au premier plan les critères d’écart, d’originalité ou de rupture, que ce soit dans l’appréhension des chefs-d’œuvre du passé ou la réception des productions contemporaines : la reconnaissance de ce qui fait événement engage nécessairement une (re)définition de la littérature. Question lourde d’enjeux, au moment où l’essor de la presse et les bouleversements du marché culturel imposent des règles inédites, souvent ressenties comme traumatisantes : la valeur d’une œuvre est-elle réductible à son impact événementiel ? celui-ci constitue-t-il une instance de légitimation ? un événement littéraire est-il encore possible dans le système éditorial moderne qui s’esquisse alors ? Le débat est aussi complexe que décisif : il questionne les effets sociaux de la littérature, et, au-delà, son possible impact sur l’histoire. L’événement littéraire oblige à se demander ce qu’est, ce que vaut, ce que fait la littérature.