Figures majeures des nouvelles poésies depuis les années 1960, fondateurs du spatialisme, Ilse Garnier (1927-2020) et Pierre Garnier (1928-2016) sont aussi les auteurs d’une création prenant pour thème la cathédrale et l’imaginaire qui lui est associé (l’architecture, le Moyen Âge, ou encore le picard pour Pierre Garnier). Leurs œuvres respectives montrent que la cathédrale n’est ni le privilège du Moyen Âge qui vit construire la plupart de ces églises monumentales, ni celui du xixe siècle où elles furent restaurées et devinrent objets de fiction, ni celui des auteurs catholiques. Chez Pierre et Ilse Garnier, ouvertement non croyants, elle renvoie à un faisceau conceptuel multiple, entre attachement aux racines régionales et désir d’universel, passé et présent, spiritualité et immédiateté du concret, langue française et picard, poésie linéaire et poésie spatiale. Densité historique, enracinement local, désir d’élévation et modèle esthétique s’y cristallisent, apportant une nouvelle fois la preuve que le passé n’a rien de contradictoire avec l’avant-garde.