Le Neutre est le fil rouge de l’œuvre de Roland Barthes, qu’on trouve dès Le Degré zéro de l’écriture et jusqu’à La chambre claire, aussi bien dans les livres, les articles et les entretiens, comme une préoccupation ou une aspiration éthique. Il apparaît pour la première fois au grand jour, explicité comme tel, dans ce cours du Collège de France donné en 1978.
Autrefois publiées sous la forme des notes préparatoires, les treize séances paraissent ici sur la base d’une transcription des enregistrements. On retrouve ainsi l’une des dimensions décisives de la parole de Barthes telle qu’elle se déployait dans son enseignement : la germination du discours, ses dérives, ses boucles, ses excroissances, et le charme incomparable de la phrase.
C’est dire l’importance de ce cours, où le Neutre trouve une formulation ample, détaillée, ouvertement placée sous le signe du fantasme, du projet, ou de la projection.
« On a défini comme relevant du Neutre toute inflexion qui esquive ou déjoue la structure paradigmatique, oppositionnelle, du sens, et vise par conséquent à la suspension des données conflictuelles du discours. […] On a essayé de faire entendre que le Neutre ne correspondait pas forcément à l'image plate, foncièrement dépréciée qu'en a la Doxa, mais pouvait constituer une valeur forte, active. »
Éric Marty a établi l’édition définitive de ce cours et a assuré un système de notes à la fois sobre et efficace. Sa préface rappelle le contexte de la fin des années 1970 et situe les enjeux les plus actuels du Neutre.