Malgré plusieurs centaines d’auteurs actifs, la bande dessinée n’est toujours pas une industrie culturelle à part entière sur le continent africain. Le manque de distributeurs et diffuseurs et de soutien des pouvoirs publics, l’absence de formation et la faiblesse du pouvoir d’achats expliquent en partie cette situation. De fait, la production en matière de BD se limite essentiellement à de l’autoédition et la diffusion se fait souvent sur un mode artisanal, de la main à la main ou via des manifestations littéraires. Au milieu de ce désert éditorial, la Côte d’Ivoire fait figure d’exception. Dotée d’une tradition ancienne en matière de bande dessinée (les premières apparitions datent des années 60), s’appuyant sur une presse vivace et largement diffusée, le 9e art ivoirien a acquis ses lettres de noblesse et constitue une réelle source de rayonnement dans la culture locale. L’exemple le plus frappant est le journal d’information et de BD, Gbich!, véritable phénomène de société qui, après avoir tiré jusqu’à 40 000 exemplaires à la fin des années 1990, a entraîné la création d’un véritable groupe de presse national touchant à plusieurs domaines (radio, studio d’animation, presse généraliste, ingénierie culturelle, etc.). Ce livre revient sur près de 60 années de parcours d’un art qui, importé de l’occident au départ, est devenu l’un des marqueurs identitaires forts du pays et constitue un exemple frappant de maturation d’une BD à la fois typiquement nationale et modèle pour les autres pays francophones.