La France possédait, autrefois, dans l’Amérique septentrionale, un vaste empire, qui s’étendait depuis le Labrador jusqu’aux Florides, et depuis les rivages de l’Atlantique jusqu’aux lacs les plus reculés du haut Canada.
De notre empire perdu, l’Acadie, par son histoire tragique, est une des provinces les plus intéressantes et cependant les moins connues ; les malheurs de cette Pologne d’outre mer ont inspiré les poètes.
À Québec même, ou Montréal, les Provinces Maritimes (c’est ainsi que l’on désigne actuellement ce qui fut l’ancienne Acadie), ne sont guère plus connues, que, pour un Parisien, la Suède ou la Norvège, bien que, grâce à l’Intercolonial, on puisse actuellement les atteindre en moins de vingt-quatre heures. Enveloppées par les brumes de Terre-Neuve et la grande houle de l’Atlantique, ces Provinces Maritimes sont la patrie de près de cent cinquante mille Français demeurés fidèles à leurs traditions, malgré cent cinquante ans de domination étrangère. Confondus, le plus souvent, avec leurs frères de la province de Québec, ils en diffèrent totalement, tant par leur histoire que par leurs aspirations : unie au Canada depuis 1867, date de la confédération des colonies anglaises de l’Amérique du Nord, l’ancienne Acadie lui était auparavant tout aussi étrangère que la Louisiane, et les deux nations ne possédaient ensemble qu’une lointaine communauté d’origine, rameaux du vieil arbre gaulois, depuis longtemps séparés.