Ce livre tente d’identifier, par les mots et les images du temps (lithographie ou grands genres), un « moment politique frénétique » français (1824- 1834). À l’instar du « drame frénétique » lorsque, boulevard du Crime (notre boulevard du Temple), chacun allait pleurer, et plus encore se livrer aux délices de l’angoisse vécue en commun, de sept heures à dix heures du soir. Maïté Bouyssy interroge aussi bien l’usage des larmes et de la compassion, que la mise en scène de l’horreur. Autour de figures charnières — tel Louis XII, le roi malchanceux qui a accompagné la mode troubadour, avant et après la Révolution — et de l’expression de « flots de sang » qui circule dans les lettres et les arts, des images furent reçues comme politiques. Des Réjouissances publiques de Boilly (1826 pour la gravure de Villain) à La Grèce sur les ruines de Missolonghi de Delacroix (1826), en passant par la célèbre lithographie Rue Transnonain le 15 avril de Daumier (1834), l’incessante circulation des mots à l’image montre un dispositif rhétorique qui mène au son. Car le cri donne le lieu social des émotions présentées et redéfinit les raisons du succès de ces auteurs, qui gèrent la dénonciation telle des fables mises en image. Il ne s’agit ici ni d’éluder les périls de la surinterprétation ni de donner un métasystème de clés, mais de rendre compte des vraies raisons du succès de la réception de ces œuvres. Sous diverses formes, cet ouvrage traite donc du citoyen et du genre, des foules et de Bailleurs, du juste et de l’injuste ou de l’ordinaire ordre policier. Quand se trame un ordre prédémocratique s’accroît l’inquiétude de la « montée du cadavre » qu’ont notée d’autres historiens. Cette inquiétude semble avoir partie liée avec le processus d’acceptation de l’égalité symbolique réalisée dans le suffrage universel de 1848.