En continuité avec la pensée de Paul Valéry, René Passeron définit en 1971 la poïétique comme « la promotion philosophique des sciences de l’art qui se fait », ajoutant que, pour elle, la peinture se comprend comme « un phénomène d’atelier » – à l’inverse de l’esthétique qui la conçoit comme « un phénomène de galerie, de musée, de lieu public ». Dans cette perspective poïétique, interrogeant les conduites créatrices depuis (avec) la question du lieu, cet ouvrage collectif pluridisciplinaire se propose d’aborder ce phénomène qu’est l’atelier à la lueur de toutes les disciplines qu’intéresse la recherche-création : de l’atelier de peinture au studio virtuel de création numérique, de l’atelier d’écriture au studio de danse, de l’in situ à l’in vivo ou l’in silico, c’est ainsi l’atelier en acte(s) à la croisée des arts qui en motive les analyses croisées. En quoi l’atelier – quelles qu’en soient les dénominations : studio, fabrique, workshop, laboratoire… – participe-t-il de ce que le philosophe Michel Guérin propose sous le néologisme de « topoïétique » ? Car si créer veut dire « donner lieu (au lieu) », la dimension topique se révèle un trait essentiel de la poièsis, et l’atelier constitue alors de façon paradigmatique ce lieu singulier/commun, réel/symbolique, fixe/mouvant… qui donne lieu au lieu de l’œuvre.