Une vision déterministe de l’univers a longtemps rejeté le désordre et le hasard qui viendraient perturber l’enchaînement bien ordonné des causes et des effets. Ce n’est qu’à partir des années 1960-1970 que les simulations numériques associées aux mathématiques ont fait émerger une complexe recomposition théorique et conceptuelle autour du non-linéaire et de l’étude des instabilités. Suivre des « silences au fil des géométries » à travers le choix volontairement hétérogène d’ouvrages de José Saramago (prix Nobel 1988), Michel Houellebecq (prix Goncourt 2010) et Fernando Pessoa (l’un des plus grands poètes du XXe siècle), c’est avant tout s’efforcer de tenir ensemble imagination et rationalité. C’est proposer une association herméneutique singulière entre sciences physiques de la complexité et littérature, capable de désigner, chez les trois auteurs, un état d’indétermination irréductible établissant pour chacun des trois, mais par extension possible pour toute la littérature, que le silence, dans ses postures multiples, est certainement la force majeure de l’écriture. Et qu’aucune science exacte ne saura sans doute jamais modéliser ces zones denses et obscures de la parole, univers ineffable dans sa complexité sans égal.