Qu’est-ce qu’être astronome au siècle des Lumières ? Comment caractériser ses activités, ses pratiques, ses réseaux et ses insertions institutionnelles ? Cette biographie à plusieurs voix de Jérôme Lalande propose de décrire les espaces sociaux, scientifiques et culturels qui ont façonné son parcours de savant. L’inscription dans le champ astronomique du XVIIIe siècle constitue une première entrée pour saisir une trajectoire scientifique d’abord ancrée dans des institutions prestigieuses de légitimation. Professeur au Collège de France, organisateur d’un réseau informel d’élèves qu’il forme lui-même, Lalande s’est toujours efforcé de construire des places fortes pour pratiquer l’astronomie. La Révolution lui donne l’occasion de mettre en œuvre ses idéaux organisationnels sous la forme du Bureau des longitudes qu’il imagine en point nodal de l’astronomie française. Le travail épistolaire, indispensable à Lalande pour maintenir son réseau de relations, offre une deuxième entrée pour retracer la trajectoire de l’astronome. Très tôt inséré dans l’espace européen des sciences, Jérôme Lalande use de sa correspondance pour amasser les observations, transmettre des mémoires, affermir ses positions institutionnelles et organiser les controverses. L’implication de Lalande dans les affaires de son temps organise la troisième entrée. La constitution du champ astronomique et la solidification progressive des repères disciplinaires n’empêchent pas un investissement scientifique et technique de Lalande bien au-delà de ses travaux de prédilection. Dissertant sur l’ingénierie hydraulique du Canal du Midi, rédigeant le compte rendu d’un long séjour en Italie ou défendant sa conception particulière de l’athéisme, Jérôme Lalande façonne son époque autant qu’il est façonné par elle.