Le marché de la rencontre n'a pas attendu Meetic, Tinder ou Grindr pour prospérer. Tout au plus l'ère numérique lui a-t-elle conféré, en même temps qu'un regain de vitalité, une légitimité nouvelle ?
Le marché de la rencontre n'a pas attendu Meetic, Tinder ou Grindr pour prospérer. Tout au plus l'ère numérique lui a-t-elle conféré, en même temps qu'un regain de vitalité, une légitimité nouvelle. Pendant près de deux siècles, ce domaine d'activité de réputation douteuse a fait de la discrétion une qualité première.
Son entremise est longtemps demeurée taboue dans les familles.
L'examen des registres d'agences matrimoniales et de la presse dédiée aux annonces permet néanmoins de lever le voile. Par-delà les figures chères au vaudeville – ambitieux coureurs de dots, parents autoritaires, oies blanches ou vieilles filles rêveuses –, qui sont les créateurs de ces agences, quels sont les services qu'ils proposent et quelle en est la clientèle ?
Du Courrier de l'hymen dans les années 1790 au Chasseur français (qui revendique 4,5?millions de naissances), les annonces sont aussi la source d'une histoire de l'ordinaire, à hauteur des hommes et des femmes à la recherche d'amour et de bons partis. Par leurs silences entendus et leurs connotations équivoques, elles nous apprennent ce qui, selon les époques, est communément perçu comme admis, désirable ou au contraire inacceptable. Elles sont ainsi des indices de la transformation des sociétés, qu'il s'agisse de l'équilibre entre enjeux économiques et romantiques, du poids des stéréotypes de genre ou des failles grandissantes de la société bourgeoise patriarcale.