Titulaire des chaires d'Écriture sainte et d'Histoire naturelle au Colegio Imperial de Madrid, le jésuite Juan Eusebio Nieremberg [1595-1658] est un fécond polygraphe auteur d'environ 5.740 pages folio en castillan et de 5.000 pages folio en latin. Dans cet ensemble fort varié, le traité De Arte Voluntatis se singularise sous deux rapports : d'une part, son latin est généralement plus élaboré que dans d'autres œuvres. D'autre part, bien des thèmes évidemment catholiques, surabondamment représentés dans ses œuvres espagnoles en sont absents : ainsi, des dogmes aussi essentiels que le péché d'Adam défini comme cause de notre condition mortelle, ou la prééminence de la révélation biblique sur la sagesse des nations païennes. Singulier monument du desengaño, ce traité nous invite à réviser certaines idées reçues sur la discipline de la pensée et sur l'orthodoxie au Siècle d'Or. Conçu par le plus sédentaire des Madrilènes, le De Arte Voluntatis fut publié trois fois à Lyon et une fois à Paris, ce qui en fait un élément des échanges culturels franco-espagnols au XVIIème siècle.