Le travail exposé dans ce livre est issu d’une série d’études sur l’histoire romaine sous les empereurs, en interrogeant les souvenirs attachés aux lieux et aux monuments.
Où l’histoire s’arrête, la légende commence. Pour les hommes du moyen-âge, Néron, exécrable tyran et premier persécuteur des chrétiens, se confondait avec l’antéchrist. Encore aujourd’hui sa mémoire demeure odieuse, et beaucoup de ruines dans l’état romain passent pour des débris de villes détruites par Néron. Au moyen-âge, on croyait que son fantôme errait sur le Pincio, sur cette aimable colline qui est aujourd’hui le rendez-vous des promeneurs...
L’empire étant plus récent que la république, il y a plus de chances pour que les ruines qu’il a laissées subsistent encore, et puis ses œuvres furent matériellement plus grandes. Ce n’est pas à dire qu’elles soient aussi respectables. Une pierre du Tabularium, où l’on gardait les décrets et les traités d’un peuple libre, le tombeau de Bibulus, un obscur édile à qui ce tombeau fut élevé, dit l’épitaphe, à cause de sa vertu, me touchent plus que les débris de la maison dorée de Néron ou des thermes gigantesques de Caracalla ; mais, il faut le reconnaître, ces débris sont immenses. Au despotisme appartient le colossal. C’est lui qui élève la tour de Babylone et les pyramides d’Égypte, car il a beaucoup de bras sans volonté pour servir la sienne.