« Au milieu des volutes et des rires d’une boîte de nuit parisienne, le regard d’un homme inconnu, puis ses doigts se collent à ton corps. Tu voudrais partir, te détacher, mais tu restes immobile et muette. “ Tu viens d’où ? ” sont les premiers mots qu’il prononce. Les métisses, ça l’excite, il ajoute. Dans l’espace clos et aveugle du fumoir, les mots fuient, ta fierté aussi. Celle qui auréolait ton histoire familiale éclatée entre le Niger, l’Argentine, l’Algérie et la France. L’agresseur du fumoir et d’autres avant lui, d’autres après lui, salissent, ternissent ton amour pour le récit de tes origines familiales. Souillé par leurs bouches, tu n’en veux plus. Tu voudrais presque l’occulter en même temps que l’agression, le recouvrir du voile bleu de l’oubli. Le bleu est doux, le bleu plaît, le bleu n’abîme pas. Recouvrir de bleu ce corps érotisé, ce corps exotisé et l’histoire qui va avec. »
A. S.
Anouk Schavelzon est née en 1998 à Paris et y vit toujours. Après des études littéraires et théâtrales, elle choisit de se concentrer sur sa propre pratique de l’écriture. Elle est membre du collectif « La Textape », qui organise régulièrement une scène ouverte aux Lilas. Le bleu n’abîme pas est son premier roman.