On ne s’intéresse guère en France à ce qui se passe dans les îles de la Manche, et on y voit flotter le drapeau anglais avec autant d’indifférence que s’il s’agissait d’une station navale de l’Océan-Pacifique. Mais les touristes français commencent à les visiter, Jersey au moins, la plus voisine du groupe ; c’est l’occasion de faire une partie sur mer, de « voyager à l’étranger », d’admirer des sites qu’on dit pittoresques.
Les Anglais, oublieux de l’histoire, se laissent volontiers aller à regarder l’archipel de la Manche comme une « possession » au même titre, par exemple, que Gibraltar ou Malte. Une de leurs géographies scolaires dit naïvement : « Les îles de la Manche sont tout ce qui nous reste de nos possessions en France.... » C’est le contre-pied de l’histoire, car l’Angleterre a été conquise par un duc de Normandie ; on pourrait plutôt dire que l’Angleterre, avec l’empire britannique tout entier, est une dépendance de ce dernier fragment du duché de Normandie.
Jusqu’aux derniers siècles du moyen âge, l’histoire de cet archipel ne se sépare pas de celle de la Normandie et, plus particulièrement, du Cotentin, auquel il fait face.
Comme l’histoire authentique des îles ne commence qu’au milieu du moyen-âge, l’imagination de maints écrivains s’est donné libre carrière dans leurs origines historiques.