Les plateformes font désormais partie du quotidien des étudiants, des enseignants et du personnel administratif des universités. Supports des cours à distance ou des cours en présentiel, elles sont omniprésentes et leurs usages se multiplient. Régulièrement étudiées dans une perspective interactionniste, cognitiviste ou encore socioconstructiviste avec des problématiques interrogeant le processus de l’apprentissage et les manières de l’améliorer, les plateformes sont rarement considérées comme des espaces imposant aussi une certaine vision de l’enseignement supérieur. Pour autant, elles proposent une architecture dessinée de manière à favoriser certains aspects considérés comme importants dans la transmission du savoir. En outre, elles offrent à lire, des projets institutionnels, scientifiques et didactiques qui s’inscrivent dans une épistémologie bien définie. Si les plateformes sont l’expression de courants scientifiques, la métaphore des textes politiques, comment les acteurs de ce que l’on nomme aujourd’hui le « numérique » habitent-ils ce lieu ? Quel quotidien enseignants, apprenants, tuteurs, acteurs du distanciel inventent-t-ils pour reprendre le titre d’une recherche de Michel de Certeau ? Comment le numérique se banalise-t-il, se normalise-il ? Comment et pourquoi une technologie initialement prévue pour un autre usage que celui de l’enseignement s’implante dans des pratiques de classes, dans des textes institutionnels jusqu’à devenir centrale. Pour tenter de répondre à ces questions et entamer une réflexion sur les pratiques du numérique à l’université, une étude qualitative a été menée dans des formations en ligne de Master en Sciences du Langage.