Par monarchie française, nous n’entendrons ni celle des Mérovingiens, ni celle des Carolingiens, mais la monarchie qui est sortie du fond de la nation avec l’avènement de Hugues Capet, produite par les causes mêmes qui, dans le courant des VIIIè et IXè siècles, ont fait la nation française. La monarchie mérovingienne n’a exercé qu’une souveraineté de conquérants, sans action sur la masse du peuple avec laquelle elle n’a guère pris contact ; la monarchie carolingienne a été une royauté militaire, un gouvernement de conquérants intérieurs, si l’on peut s’exprimer ainsi, ce qui en explique la rapide extension, l’éclat et la fragilité ; la monarchie capétienne, au contraire, a coordonné les éléments vitaux du pays dont elle s’est elle-même formée.
Ceci s’est fait parmi les désordres effroyables que produisirent, durant les VIIIe et IXe siècles, les invasions barbares et les ravages plus terribles encore qu’engendrèrent les luttes, en tous lieux répétées, d’individu à individu, de famille à famille, de localité à localité.
Partout règne la terreur : nulle sécurité, partant nul commerce. Les champs sont dévastés et le paysan quitte le labour. De la civilisation romaine, qui avait fleuri sur tous les points de la Gaule, il ne reste que des ruines. Tout est détruit...