Récits de certains faits
Yasmina Reza
Editeur: Flammarion
Un jour Édith rencontre un homme, il est pompier, isolé aussi. Ils nouent une sorte de flirt. Ils se voient dehors, en cachette, sur des aires diverses, ils discutent. Pas grand-chose de vraiment intime. À la cour qui lui demande ce qu’il représentait pour elle, l’homme répond avec un fort accent toulousain : "J’étais sa bulle d’oxygène.
– Cette expression c’est la sienne ou elle l’exprimait autrement ?
– Ben… c’est vrai que j’étais sa bulle d’oxygène.
– Et de quoi parliez-vous ?
– De tout et de rien.
– Mais encore ?
– Heu… On parlait de tout et de rien.
– De tout et de rien.
– Oui, c’est ça… De tout et de rien."
Dans les tribunaux, les gens disent souvent qu’ils ont parlé "de tout et de rien". Ils se voient dans des endroits qui sont nulle part, ils se disent des choses dont la substance s’étiole aussitôt. Pas de reproches, pas de chagrins. C’est l’arrière de la vie.