Mort en 2003, à l'aube du nouveau millénaire, Maurice Blanchot semble appartenir à un siècle désormais révolu. S'effaçant de plus en plus, en accord avec une expérience de l'espace littéraire marquée par le neutre, l'anonymat et le silence, son nom serait-il voué à cette inéluctable « disparition » qu'il supposait être l'essence même de la littérature ? Sans doute. Mais à force d'avoir écrit la disparition et la dispersion, Blanchot est devenu à bien des égards exemplaire de ce « personne » qu'est la figure de l'auteur au XXIe siècle. Innombrable, presque innommable, disparaissant tout en faisant paraître de discrets fragments, l'écrivain contemporain se perd dans les rets d'une toile qui le dépasse et dont Internet est la manifestation par excellence. En cela, c'est peut-être au siècle de la mort de Blanchot que l'espace littéraire tel qu'il l'entendait s'est pleinement réalisé – quitte à ce que cette utopie déçoive.