L’Église catholique est en crise. Son lien multiséculaire à la société est en voie de se rompre. Les analyses historico-sociologiques ne manquent pas. Les approches fondamentales sont plus rares. En 2020 disparaissait l’un des plus grands théologiens de notre temps. Joseph Moingt laisse une œuvre considérable bâtie sur une longue carrière d’enseignement de la théologie et de dialogue avec le monde. Ses ouvrages grand public ont connu un franc succès depuis La transmission de la foi (1976) jusqu’à son livre-testament, L’esprit du christianisme (2018), en passant, entre autres, par Croire quand même (2010). Ses ouvrages érudits sont moins connus. Ils ouvrent des pistes de travail inestimables fondées sur la nature profonde du christianisme abordé dans son lien originel avec la raison. L’ambition du présent essai consiste à restructurer cette « somme » pour en faciliter l’accès et encourager sa lecture. Une idée-maîtresse guide le parcours proposé : l’Église peut d’avance renoncer à toute réforme interne et à toute audience du monde si elle ne redécouvre pas la révolution spirituelle engendrée par l’idée chrétienne de Dieu. Pour ce faire, Moingt appelle tout chrétien à développer une « foi critique » de ses présupposés et de sa tradition. Le jésuite français fait ainsi le pari qu’un espace de reconnexion peut à nouveau s’ouvrir entre le christianisme et la société occidentale malgré le déclin de la religion chrétienne. Une voie évangélique d’humanisation reste disponible à quiconque s’ouvre au travail universel de l’Esprit en faveur de la liberté et de la fraternité.