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grande couv
Le pouvoir des mains invisibles
Clément Crucifix
Editeur: Karthala
16,99 €

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« Avant c’était El Progreso, aujourd’hui c’est El Pobrezo », me dit l’un de mes interlocuteurs, jouant des mots progrès et pauvreté. Dans ce village reculé du Mexique, nommé « Le Progrès », les plantations de café à l’abandon ne sont plus que le symbole d’une époque révolue, où l’économie tournait autour de la terre. Désormais, c’est celle de la présence massive d’institutions financières, offrant des crédits à des populations précarisées par des décennies de politiques néolibérales. Leur présence témoigne surtout de l’extension des frontières de la finance vers des lieux périphériques. Pourtant, ces flux financiers ne circulent pas dans le vide. En étant utilisés par les populations, ils s’engouffrent dans les méandres de relations sociales complexes, répondant à des manières autres de comprendre ce qui fonde la valeur d’un individu et sa place dans le collectif. En suivant ces usages de l’argent, ce livre démontre le rôle central joué par les acteurs intermédiaires qui, des agents de crédit aux leaders locaux, font la traduction entre, d’une part, la rationalité imprimée par les institutions financières et, d’autre part les dynamiques sociales, politiques, économiques et écologiques qui leur préexistent localement. Dans les plis de ces enchevêtrements, se dessine une société rurale en pleine mutation, où les rapports de pouvoir jadis articulés autour de la terre se transforment et où des formes de « vivre ensemble » tentent de subsister. Basé sur une enquête ethnographique de plusieurs années, cet ouvrage prend le contrepoint des macro-récits sur le capitalisme pour documenter les effets qu’il génère in situ. Loin d’être une force homogène, se produisant de manière automatique, il dépend du travail réalisé par une série de mains invisibles pour se réaliser concrètement. Dans ces entre-deux, le capitalisme – en apparence si évident – se teinte de nuances multiples et montre potentiellement toute sa vulnérabilité.