À l'émergence de la figure de l'ouvrier sur la scène sociale et politique française au XIXe siècle correspond l'émergence d'une parole ouvrière sur la scène théâtrale. Les lendemains de la Première Guerre mondiale vont voir se développer dans le sillage de la révolution et du Parti communiste, un certain nombre d'expériences, de tentatives, de faire participer le théâtre à la constitution d'une conscience ouvrière militante. Nous aborderons dans cet ouvrage la question prolétarienne au théâtre dans l'entre-deux-guerres, dans une optique volontairement plurielle : analyse du sens que recouvre l'usage des différentes terminologies – théâtre ouvrier, théâtre prolétarien, théâtre prolétarien révolutionnaire, théâtre d'agit-prop –, étude des liens que les artistes ont tissés avec les organisations ouvrières syndicales et communistes et des implications esthétiques et formelles qu'investissent ces artistes et les militants dans la représentation du monde prolétaire et de la révolution. Enfin cette étude implique une prise en compte consubstantielle des pratiques théâtrales. Où les pièces se sont-elles jouées ? Dans quel cadre ? Pour quel public ? Quelles traces éventuelles de ces expériences ? À ce titre, l'archive occupe une place essentielle dans ce livre, permettant non seulement de retrouver la trace de ces pratiques, mais également d'interroger les récits mythiques qui grèvent usuellement l'histoire des théâtres révolutionnaires.