Géographe, pédagogue, écrivain et théoricien anarchiste, Élisée Reclus fait aujourd’hui l’objet d’un nouvel engouement. Parmi ses nombreux ouvrages, Histoire d’un ruisseau (1869) et Histoire d’une montagne (1890) ont un statut un peu à part, à la fois traités géographiques à destination des plus jeunes et véritables œuvres littéraires. À travers le portrait, réel ou imaginaire, de la nature qui l’entoure et dont il est partie prenante, Reclus invite l’être humain à s’intéresser à son milieu de vie. Par un phénomène de divulgation scientifique, plus que de vulgarisation, il permet au lecteur d’accéder à un monde souvent inconnu de lui, mais essentiel à sa propre sauvegarde. Car, selon lui, seules la connaissance et la maîtrise de leur milieu peuvent conduire les êtres vivants, quels qu’ils soient, à s’émanciper. À travers l’étude de ces deux œuvres, mais aussi du contexte historique, éditorial et esthétique de leur production, Benoît Bodlet tente d’identifier et d’analyser les procédés littéraires qui permettent à Élisée Reclus de dénoncer les formes spatiales du pouvoir et la dimension géographique de l’injustice afin de faire émerger un nouvel espace politique.