Pour que la fiction émeuve et charme, il faut qu’elle soit sincère. Tels sont les contes, vieux mythes naturalistes tombés dans la conscience populaire, les légendes héroïques ou sacrées, et les romans de mœurs nationaux...
De la vallée du Nil, qui plus qu’aucune autre contrée est la terre sainte, la patrie vénérable de la civilisation, on ne connaît guère encore que les inscriptions monumentales gravées sur les murailles des temples, des pylônes et des hypogées. L’Égypte des pharaons se dresse ainsi pour nous solennelle et formidable, non sans austère tristesse, dans un mystérieux éloignement. On imagine que ces peuples n’ont songé qu’à conquérir la terre, à creuser les montagnes ou à construire des pyramides pour assurer à leurs momies un repos éternel. C’est par une illusion du même genre qu’on se représente les Hébreux toujours en prière, offrant des sacrifices ou chantant des psaumes à Jahvé (Jéhovah), et cela quand Amos et Isaïe nous parlent des chansons à boire qu’entonnaient à pleine voix, au son du kinnor, des luths et des tambourins, les convives couchés sur des lits d’ivoire, étendus sur des divans, près des cratères et des coupes couronnées de fleurs, quand le Cantique des cantiques, fort galant libretto, atteste chez ce peuple l’existence d’une poésie érotique, quand les plus vieux poèmes ou fragments de poèmes conservés dans les livres historiques ... n’ont aucun caractère religieux.
Il en faut dire autant de la grave et hiératique Égypte des historiens grecs : à côté des inscriptions historiques et funéraires, et d’une littérature sacrée des plus riches, on possède toute une bibliothèque où presque chaque genre littéraire, poème épique, ode, satire, annales, romans, lettres, amplification de rhétorique, traités de morale ou de sciences, instructions judiciaires, rapports de police, registres de comptabilité, etc., se trouve déjà représenté.