Dans toute l’histoire de la peinture – de Masaccio à Matisse, de Vermeer à Vuillard –, les artistes ont joué avec les portes, à la symbolique manifeste et mystérieuse. La porte qui sépare deux endroits, deux univers, deux mondes (la réalité et le rêve, la vie et la mort, etc.), qui les isole, mais qui, dans le même temps, est le lieu de passage de l’un à l’autre et dont le seuil découpe le temps : l’avant et l’après son franchissement. Bref, la porte est intimement liée à notre vie, elle en sépare le côté privé de son aspect public.
On comprend dès lors l’importance que peut prendre sa représentation dans un tableau, qu’elle soit inconsciente ou parfaitement réfléchie.
En analysant des oeuvres de Degas, Fragonard, Salviati et Vallotton, l’auteur fait voir le rôle de ces portes que l’on distingue souvent mal dans les compositions, mais qui sont essentielles à leur compréhension, à chaque fois au coeur d’un affrontement hommefemme. Comme si les artistes voulaient souligner, par le battement d’une porte, le côté éphémère et l’inconstance des relations entre les deux sexes. Comme s’ils renvoyaient brutalement chacun d’entre nous à son incommensurable solitude… à l’image de ce qu’Adam et Ève ont dû ressentir lorsque s’est refermée sur leurs talons la première des portes, celle du Paradis.
Edouard Dor a notamment publié aux éditions Sens & Tonka : L’Ennui des deux Vénitiennes [Sur un tableau de Carpaccio] (2006), Les Couilles d’Adam [Sur une fresque de Masaccio] (2007), Une inquiétante étrangeté [Sur trois tableaux : Véronèse, Manet, Matisse] (2008), Le Concert [Sur l’ultime tableau de Nicolas de Staël] (2010), Énigme de la mélancolie [Sur un tableau de Pontormo] (2011). Il a également publié aux éditions Michel de Maule Quand penser en Chine se disait Mao (2012) dans la collection « Je me souviens » et Sur les Barques de Braque (2013).